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Récit et photos de trek en Islande
Vatnajökull, le trek des glaciers

Samedi 18 juillet

Barrage d’Eyjabakkar, vue sur le Snaefell et le Vatnajökull, refuge de Geldingafell

La nuit a été très ventée, mais ce matin soleil et nuages se partagent le ciel. Les sacs sont prêts et vers 9h30, nous voilà partis en minibus pour rejoindre Egilsstadir où l’on doit récupérer des bâtons à l’aéroport et prendre les courses commandées à Netto. Ensuite, direction le camping où l’on dépose nos gros sacs qui seront acheminés à Höfn, destination de fin de trek. Nous avons maintenant 1h30 de route vers le sud-ouest, en direction de l’énorme calotte glaciaire du Vatnajökull, le 2e glacier le plus volumineux d’Europe. Un décor de mélèzes et lupins nous accompagne, puis la route monte et la végétation se fait plus rare. Le ciel s’assombrit, il y a même quelques gouttes. Le chauffeur nous dépose en plein milieu de nulle part, au barrage d’Eyjabakkar vers 13h, à l’est d’un majestueux sommet caractéristique souvent couvert de neige, le Snaefell.

Ambiance Islande Vatnajökullhivernale avec ce vent qui souffle. Chacun s’emmitoufle et nous répartissons la nourriture que l’on doit emporter, environ 2kg/personne: c’est uniquement du frais puisque le reste se trouve dans chaque refuge. L’aventure commence… Que d’eau, que d’eau, le terrain est une véritable éponge qui n’absorbe plus et de nombreux lacs se sont formés. Aucun sentier devant nous, il faut se fier au tracé donné par le GPS de Kata. Nous sommes seuls au monde dans un paysage lunaire de neige et mousse brunâtre. Le temps gris et bas renforce ce paysage minimaliste incitant à un retirement intérieur. Seul le Snaefell est éclairé par les faibles rayons du soleil. Au loin, on aperçoit un renard arctique avec une proie dans la gueule. En s’approchant, le renard s’enfuit laissant derrière lui une oie sans tête. Voici donc la version islandaise du «corbeau et du renard»: Maître Renard, sur la mousse détrempée, tenait dans sa gueule, une oie déplumée. Maîtresse Kata et ses touristes alléchés approchèrent le renard qui laissa l’oie tomber. Les sacs déjà trop chargés, ils dénigrèrent ce butin et le renard malin pourra mine de rien en faire son festin…

Islande Vatnajökull

Tout ceci nous a donné faim également et il est temps de pique-niquer. De plus, nos sacs vont s’alléger! Nous longeons ensuite la plus haute montagne de la région : le Snaefell qui culmine à 1500m puis, au loin, on découvre le front glaciaire du Vatnajökull, c’est impressionnant même par temps gris. Le Vatnajökull est la plus grande calotte glaciaire d'Islande. En islandais, Vatnajökull signifie «glacier des lacs». D'une superficie de 8 300 km2, soit l’équivalent de la Corse, le Vatnajökull couvre 8 % de la superficie de l'Islande. Son épaisseur maximale est d'environ 1 000 mètres. Plusieurs volcans sont situés sous le glacier, dont certains actifs et très surveillés, car une nouvelle éruption de l’un d’entre eux serait une véritable catastrophe provoquant inondation et coulées de boue. En 1996, une éruption du Grímsvötn a déjà provoqué des inondations brutales générées par la fonte de la glace sous la chaleur de la lave. On monte, on descend sur des monticules plus ou moins durs recouverts de mousse rase. La végétation devient de plus en plus dénudée. On aperçoit un troupeau d’oies arctiques au loin. Lors de la mue, la perte simultanée des plumes de vol rend les oies plus vulnérables à la prédation. Nous en avons eu la preuve ce matin. Quelques empreintes de sabot de rennes dans la boue, mais point de rennes en vue.

On Islande Vatnajökulllaisse le Snaefell à notre droite pour aller contourner une butte en direction de la petite montagne de Geldingafell. De là, nous surplombons et apercevons le refuge au loin. Il y a un grand névé à traverser et deux ponts de neige partiellement écroulés enjambent la rivière. Kata s’approche pour sonder le terrain et voir s’il est possible de passer sur la neige ou s’il faut descendre à la rivière et déchausser pour la traverser. Islande VatnajökullFinalement, nous passons un par un en nous faisant le plus léger possible pour ne pas passer à travers. À l’arrivée, nous sommes surpris de voir que le refuge est fermé avec un cadenas. Un petit boîtier muni d’un code renferme la clé. Il est en effet indispensable de réserver. Le refuge de Geldingafell, à 700m d’altitude est une petite bâtisse jaune au milieu de nulle part, entourée de granit, de neige. À côté coule une rivière fougueuse.

Islande Vatnajökull

À l’intérieur, une pièce unique avec une petite cuisine, un poêle à bois et des bas-flancs ainsi qu’une petite mezzanine, de quoi accueillir une douzaine de personnes. Tandis que Gilles part avec un seau chercher de l’eau, nous nous affairons autour du poêle, car la température intérieure est très fraîche et l’atmosphère humide. Il y a de grandes réserves de bois et de nourriture sèche. C’est super, il est 17h40, nous avons marché à peine 4h30 par un temps gris, mais quasiment sans pluie. Un Swiss Miss, lait chocolaté suisse, va nous réchauffer en attendant que le poêle prenne le relais. Gilles revient une heure plus tard trempé, eh oui, il pleut. Il n’a pas voulu prendre de neige, et est allé chercher de l’eau vraiment loin, car l’accès à la rivière est compliqué… ensuite, l’heure du repas a sonné : Kata nous a préparé une soupe aux champignons, un riz bolognaise et pour terminer, une soupe de fruits chauds. La chaleur humaine conjuguée à celle du poêle fait monter la température, il fait maintenant plus de 20° à l’intérieur. Vers 21h, on aperçoit 2 personnes dehors par la fenêtre. Non, les champignons cuisinés par Kata ne sont pas hallucinogènes!!! Ils entrent complètement trempés. Ce sont deux jeunes Français et, bien qu’ils aient prévu de bivouaquer, ils sont très contents de pouvoir dormir au sec surtout qu’autour du refuge, le terrain granitique n’est pas très propice pour planter une tente. Après s’être réchauffés, ils sortent leur plat déshydraté et quand on leur propose le reste de riz bolognaise, ils sont aux anges!


Dimanche 19 juillet

Vue sur le Snaefell et le Vatnajökull, refuge d'Eglissel

La nuit Islande Vatnajökulla été tempétueuse: grosses rafales ainsi qu’un peu de neige, mais au réveil le vent est tombé et c’est seulement gris. Nous partons vers 10h, peu de temps après les 2 jeunes qui font la même étape. Nous marchons le plus possible sur la neige pour éviter d’être les pieds dans l’eau. Très vite nous chaussons les raquettes pour ne pas glisser, car la neige est gelée. Comme hier, il y a de très beaux éclairages sur le Snaefell, c’est le seul sommet qui prend les timides rayons du soleil. Cela monte régulièrement et rapidement, nous longeons le glacier Vatnajökull et pouvons admirer la calotte glaciaire, les langues qui s’en échappent et le chapelet de petits lacs glaciaires à ses pieds, tout ceci à travers la brume et les quelques trouées bleues dans le ciel bien nuageux. Vers le Sud, les montagnes de rhyolithe sont éclairées par le soleil. Quel paysage! Une petite averse de grésil, le temps du pique-nique pour une nouvelle photo sous les capuches pour la collection de Sylvie. Il faut vite repartir pour se réchauffer.

Islande Vatnajökull

Plus on descend et moins la neige est présente. On va donc ôter les raquettes, contourner une colline, continuer à descendre et apercevoir le refuge d’Eglissel derrière un beau lac. Belle ambiance hivernale pour cette 2e journée de trek dans la région très isolée de Lonsöraefi. Après une bonne averse, le soleil nous réchauffe à l’arrivée au refuge. Il est 16h40, nous avons parcouru environ 18kms et avons marché 4h30. Tout comme le premier refuge, Kata fait le code pour avoir accès à la clé du cadenas. Celui-ci, belle bâtisse blanche est plus grand et peut accueillir environ 25 personnes. Nous nous installons pour 2 nuits. Le cadre est beaucoup plus bucolique: un beau lac, de petites fleurs, une belle cascade en contrebas. Nous faisons une bonne flambée et pour l’eau, il suffit de la prendre dans le lac. Un Swiss Miss (nous y avons pris goût) puis nous regardons la carte et le livre d’or du refuge. Les quelques commentaires en français parlent tous de mauvais temps et de hardes de rennes dans les parages qui viendraient même boire au lac le soir. Islande trekLes 2 jeunes arrivent 2h après nous, ils ont galéré, car les crampons ne tenaient pas sur leurs chaussures. Kata nous a préparé des pâtes au saumon et une crème au chocolat, miam, miam! Nous observons le ciel qui se dégage bien, cela est de bon augure, à suivre…


Lundi 20 juillet

Vallée de Vididalur, cascades et traversées de gué, retour au refuge d'Eglissel

Le ciel est couvert avec quelques trouées de bleu. Aujourd’hui, le sac nous paraît bien léger: il ne contient que le pique-nique et les indispensables vêtements de pluie. Nous allons randonner dans la vallée voisine de Vididalur, l’une des rares dans cette région à avoir été habitée. Il est difficile de croire que des hommes ont réussi à survivre dans cet environnement sauvage, jusqu’au début du XXe siècle.

Islande trek

Nous longeons d’abord une faille avec le torrent en contrebas avant de descendre. Kata aperçoit la harde de rennes au loin, une bonne quarantaine, de l’autre côté du torrent. Nous nous déchaussons et, en slip, traversons deux par deux, pour faire front au courant. L’eau est très froide, atteint le genou, mais le courant n’est pas très fort. Arrivés de l’autre côté, bien qu’encore très loin d’eux, les rennes commencent à remonter pour traverser un névé. Pas la peine de chercher à s’en rapprocher. De belles cascades avec des ponts de neige, le paysage est superbe et le soleil perce un peu. Nous retrouvons un sentier balisé qui longe une petite rivière avant de descendre dans une prairie où se trouvent les anciennes fermes: il ne reste plus que quelques pierres dont une qui indique le nom de deux personnes ayant vécu là de 1883 à 1897. Également deux roues de meule, vraiment une vie d’ermite. Notre pique-nique démarre sous le soleil, mais le temps que Sylvie fasse la photo, il pleut déjà… Et une de plus sous les capuches!!! Mais cela ne dure pas, le soleil est de retour.

Encore Islande trekun gué assez profond, mais le courant n’est pas trop fort. De nouveau, déshabillage et c’est parti, 3 par 3, bras dessus, bras dessous en tenant un bâton à l’horizontale entre nous. Nous passons en premier avec Kata, doucement car les rochers sont glissants, l’eau est moins froide, mais monte en effet jusqu’au slip et le courant a tendance à nous faire dévier; c’est celui qui est contre le courant qui guide et il faut être synchro et avancer ensemble. Ça y est, nous sommes passés, c’est maintenant au tour de Gilles, Sarah et Sylvie. Cela manque de rythme, cela dévie, mais cela passe… C’était une traversée de rivière ou bien 8kms supplémentaires! Cela a été vite choisi! Islande trek Une fois rhabillés, nous remontons le long d’une superbe cascade bordée d’orgues basaltiques, le paysage est grandiose. Il reste un petit torrent à traverser. Alors que Kata et Gilles passent en sautant de pierre en pierre, nous, comme on aime, on se déchausse pour traverser ce petit gué. En haut, un hélicoptère tourne. «Non, non, tout va bien pour nous». D’en haut, nous apercevons le toit du refuge et arrivons vers 16h30, l’heure du Swiss Miss. Sylvie, très courageuse va faire sa toilette au lac tandis que les autres vont continuer avec les lingettes. Le refuge est vide, les 2 jeunes continuaient leur chemin aujourd’hui, nous devrions être seuls pour cette 2e soirée. Au menu, soupe au chou-fleur, couscous saucisse et crème au chocolat, miam, miam! Il pleut depuis notre retour au refuge, on s’en fout, on est à l’abri et au chaud…


Mardi 21 juillet

Tröllakrokar, Jökulsa i Loni, Refuge de Mulaskali

Islande trek

Il a plu et venté une bonne partie de la nuit. Au lever, une légère accalmie et même un soupçon de soleil qui me laissent juste le temps d’aller photographier les orgues basaltiques derrière la cabane des WC! C’est en effet superbe. Départ vers 10h sous la pluie fine: nous faisons le tour du lac, remontons vers la gorge pour atteindre Tröllakrokahnaus, une formation de colonnes basaltiques sur les impressionnantes falaises de Tröllakrokar. Cela doit être magnifique par beau temps…mais pour nous, c’est purée de pois. Seules quelques formes fantasmagoriques de troll se détachent de temps à autre. Quelle déception… Nous longeons cette gorge, retrouvons le balisage, descendons pour pique-niquer dans un creux un peu abrité. À cause de la pluie fine, nous mangeons rapidement et reprenons le sentier.

Nous Islande trekdécouvrons un paysage de multiples couleurs: terrain de rhyolite pourpre, orange, voire rose, vert cuivré, noir ainsi que de toutes formes : pierriers, plissements, dykes, arêtes déchiquetées, aiguilles acérées. Quelle magie! Il manque juste un peu de lumière. Pour terminer, on traverse une mini-forêt de bouleaux arctiques aux troncs tordus et noueux avant d’arriver à une curieuse rivière «carrelée» de roches jaunes. Dernière traversée dans la pente de rhyolite, et arrivée au refuge gardé de Mulaskali vers 15h dans la vallée de la rivière glaciaire Jökulsa i Loni. Qui dit refuge gardé dit civilisation et qui dit civilisation dit douche chaude, quel bonheur! Après le repas, le ciel s’est un peu dégagé, Gilles et Patrick décident de monter sur la pente derrière le refuge pour voir l’envers du décor vu en descendant. Quant à nous les filles, le courage nous manque. Ils reviennent 1h plus tard enchantés, car les couleurs étaient plus lumineuses et il y avait un beau contre-jour sur la Jökulsa i Loni.


Mercredi 22 juillet

Refuge de Mulaskali, Illikambur, Höfn

Islande trek

Comme d’hab, le ciel est bas et il est environ 10h quand nous quittons le refuge de Mulaskali. Nous traversons la rivière sur un pont. Heureusement qu’il est là, car il n’est pas question de traverser à gué une rivière glaciaire, le bouillon indique que le courant est fort. Une chaîne permet de grimper quelques mètres dans un terrain raviné pour arriver à flanc de colline. Autour de nous, ce n’est que terrain de rhyolite, de belles couleurs malheureusement peu mises en valeur à cause de la grisaille ambiante. Dans un cirque, plusieurs sentiers balisés s’offrent à nous: nous prendrons celui de gauche pour monter sur la colline de Illikambur, la montée est raide avant d’atteindre un grand plateau que l’on longe un moment.

Nombreuses Islande trekroches déchiquetées, paysage superbe. Nous arrivons dans une gorge que nous suivons avant de continuer à flanc de colline. Le vent se monte, il faut être vigilant surtout pour les poids plume! Nous redescendons pour pique-niquer à l’abri du vent, mais la pluie ne nous épargne pas. Et un repas de plus sous les capuches, et même sous la tente-cape brevetée par Sarah! Islande trekNous terminons notre périple en rejoignant la piste où le 4x4 doit nous récupérer. Nous avons plus d’une heure d’avance, et comme il pleut, nous avançons sur la piste pour ne pas nous refroidir. Nous arrivons au pied de la Jökulsa et nous nous abritons sous quelques bouleaux salvateurs, eux-mêmes couchés par le vent. Nous apercevons d’abord un véhicule au loin, je vais à sa rencontre pour le photographier traversant la rivière. Les passagers me saluent, ce n’est donc pas notre carrosse! Je repars à l’abri et, à l’heure dite, un gros 4x4 se rapproche. Nous sortons de sous nos bouleaux et sans se faire prier, nous nous mettons au sec. Il surfe littéralement sur l’eau, poussant des m3 d’eau sur son capot, tellement le débit est élevé. Impressionnant! Le long de la piste, le paysage est magnifique, on en prend plein les yeux: des montagnes aux couleurs rouge, orange, vert, blanc à droite et, à gauche, une baie, telle celle du Mont St Michel. Il nous faudra 1h de rodéo pour rejoindre la route asphaltée. Nous arrivons donc à Höfn, terminus de notre trek vers 16h. Höfn est une commune islandaise située sur une presqu'île dans un lagon sur la côte sud-est de l'île, dans la région d'Austurland. En 2011, Höfn comptait 1641 habitants. Le chauffeur nous emmène pour faire quelques courses à Netto.

Islande trek

De là, nous avons une superbe vue sur la calotte du Vatnajökull et ses langues glaciaires qui plongent dans la mer. C’est impressionnant. Ensuite, nous allons dans un grand hébergement pour passer la nuit. Fini la solitude! Tandis que les filles vont se coucher, Gilles et Patrick vont voir le glacier. Quand ils reviennent, ils ont de superbes photos de coucher de soleil. Dans un premier temps, on croit qu’ils nous ont fait une farce en photographiant les posters du couloir! Ils insistent vraiment, Sarah et moi nous nous relevons, Sylvie quant à elle reste au chaud. En quelques minutes, nous sommes au-dessus du golf qui domine le glacier. Le soleil n’est plus là, mais le ciel rosit peu à peu: c’était donc vrai!

Auteurs : Patrick et Corine Willemain